CRITIQUE – Avatar, « d’une bêtise sans nom », mais « spectaculaire », selon le Masque

Sophie Avon de Sud-Ouest, Eric Neuhoff du Figaro, Jean-Marc Lalanne des Inrockuptibles, Xavier Leherpeur de 7e Obsession et France Inter débattent des films qui sortiront en salles. Avatars est le premier à être grillé par les critiques !
Jérôme Garcin présente Avatar : « Dans ce long film en 3D de 3h12, on retrouve la planète Pandora et quasiment tous les mêmes personnages. Mais sous l’eau l’affrontement entre les humains et les avatars Na’Vi continue, entre les Blancs et les Bleus. A way to Cameron , bien sûr, pour appeler à la protection de la nature, à l’acceptation des réfugiés et à l’hybridation. Les chiffres de mercredi dernier sont époustouflants. Il semble que nous soyons sur la bonne voie pour un grand, grand, grand succès. Je vous rappelle tout de même que le premier épisode a généré 2 milliards 700 000 dollars au box-office. »
Le masque et la plume
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Pour Xavier Leherpeur : c’est spectaculaire, mais c’est bête
Le critique n’avait pas déjà apprécié le premier ouvrage deAvatarsmais c’est trop : « Après ça, les Schtroumpfs baisent, ce qui était le premier épisode. On a les Schtroumpfs dans la piscine. C’est parti pour une très longue saga. »
Il se dit surpris que James Cameron annonce cinq films car pour lui il y a déjà beaucoup de recyclage, du point de vue des scénarios : « Ils sont tous cités. Nous avons titanesquenous avons le deuxième épisode de la saga Extraterrestre. Nous avons aussi un petit clin d’œil à terminateuret nous avons Abîme. Alors il a recyclé ses films précédents pour nous faire un scénario qui est quand même incroyablement stupide. »
Sur le récit, même les clichés l’ont déçu : « On a un vrai film sur le conflit père-fils. Ici, c’est Psychanalyse américaine. Ici, c’est lourd, c’est difficile. Ils ont tous des rivalités avec papa. C’était difficile… »
Xavier Leherpeur déplore également le discours écologiste qu’il ne trouve pas cohérent avec la manière dont le film a été produit : « Le garçon nous dit qu’il faut respecter la nature, qu’il faut être gentil avec les arbres, avec les fleurs… Mais son film aplatit la moitié de l’Amazonie. En termes de carbone, nous savons que les ordinateurs consomment beaucoup d’énergie pour les faire fonctionner. son film, n’est pas écolo du toutmalgré le message qu’il distille. »
Au lieu de cela, il a été émerveillé par la technique, et le résultat esthétique : « VSc’est absolument spectaculaire en termes de mise en scène. Pourtant, toutes les scènes sont écrites pour provoquer des boucles, des rétroversions, on vise de travers, on plonge dans l’eau. Donc, en fait, c’est assez une scène de carnaval, Pourquoi pas ! Mais le spectacle est là et le soulagement est tellement réussi que j’ai passé mon temps pendant 3 heures à me dire : ‘Mais qui sont ces gens qui se lèvent devant moi pour aller pisser ?’, mais en réalité c’était dans le film . C’est spectaculaire et c’est stupide. »
Pour Sophie Avon, un film pas bête, mais simple et binaire
Les critiques tiennent aussi à saluer l’aspect visuel, très réussi : « Il y a technicité et virtuosité. Enfin, il me semble que c’est quand même la dernière des choses, puisque c’est un blockbuster qui a coûté je ne sais combien de centaines de millions de dollars… »
Mais le scénario échoue du tout: « Une fois la technique mise de côté, que reste-t-il ? Il y a encore une histoire d’extrême maigreur avec des problèmes vraiment binaires.” Il ajoute : « Moi, j’ai entendu dire que c’est poétique, original, créatif, du jamais vu, etc. mais franchement, il suffit de regarder la nature pour se rendre compte que rien dans ce film n’est nouveau. »
Pour elle, ce film repose sur une imagination concertée, pour ne pas dire pauvre.
Eric Neuhoff n’était convaincu de rien
Pour le journaliste du Figaro, non seulement le scénario ne l’intéressait pas, mais en plus il n’était pas vraiment surpris par les images : « Le scénario, mais c’est vide. On devrait passer 3h30 à bout de souffle, mais on en passe 3 et une demi-heure à soupirer parce que rien ne se passe. Pendant le premier quart d’heure la 3D est à couper le souffle. Puis ils se sont dit que ça leur suffirait et ça a plus ou moins disparu (…) C’est mieux que dans le premier épisode mais ensuite rien ne se passe. Toutes ces frites imbibées de curaçao sont si mauvaises. »
Selon lui : « c’est quand même un film très, très nécessiteux qui coûte très cher, qui n’en finit pas. Et qui dure tout un après-midi et il n’y a même plus la planète Pandore. »
Jean-Marc Lalanne veut défendre ce film qui l’a marqué
Le critique se dit déçu mais au vu des avis de ses confrères du Masque, il tient tout de même à le défendre : « L’ambition de Cameron me frappe ici. Ce qui m’étonne dans le film, c’est qu’il est le seul à avoir cette ambition. faire un film en 3D, un blockbuster 3D à ce niveau de production, alors que la 3D c’est un truc assez démodé depuis dix ans, alors quand on met ses lunettes, on a soudain l’impression de redécouvrir un geste très ancien, totalement anachronique . »
Pour lui, c’est un film original : « Il construit une histoire qui est vraiment une histoire cinématographique et qui, contrairement à tous les blockbusters avec lesquels il est en concurrence – qui sont les blockbusters Marvel qui ont aligné leur mode de narration avec la série télévisée avec des histoires proliférantes allant tout au-dessus de la place – ça y est une sorte de classicisme de l’histoire qui, moi, m’impressionne assez. Et cette façon de vouloir imposer son propre univers, son propre univers cinéphile, malgré les standards des productions hollywoodiennes d’aujourd’hui, me frappe beaucoup.
Techniquement, il trouve le film carrément fou, comme il l’explique : « Ce n’est pas que de la 3D. Il y a aussi la variation du défilement des images. Il y a parfois 48 images par seconde dans le film et une fluidité dans le rendu du mouvement qui est stupéfiante. Et la très belle idée est d’immerger la moitié de son histoire sous l’eau. Et tout d’un coup, ces corps glissent avec un mouvement qu’on n’a jamais vu glisser comme ça à l’écran, c’est quand même incroyable et c’est une source d’émerveillement primitif. »
Il le trouve moins puissant dans ce qu’il dit, dans sa dimension fable un peu globale sur la situation de l’humanité, moins forte que la première, mais il n’en est pas moins très impressionné par le film.