La Guérinière à Caen sous les feux des projecteurs avec le film Yolo, on n’a qu’une vie

De Nicolas Claich
Publié le
Voir mon actualité
Au pied des bars de l’immeuble Guérinière, une assemblée générale impromptue rassemble les habitants du quartier autour des plants de tomates et de laitues. Tom, l’initiateur de ce jardin partagé, est élu président de l’association. Un voisin, éducateur à la salle de boxe, propose de prendre contact avec la municipalité pour obtenir les autorisations nécessaires à la poursuite du projet. La scène n’est qu’une fiction, elle vient du film Yolo*, on n’a qu’une viesur les écrans à partir de ce mercredi 16 novembre 2022. « On aimerait créer un vrai jardin partagé », confie Laurent Brard, réalisateur du long métrage au sein du collectif Art Vif.
Les habitants deviennent acteurs
Créé en 2012, le collectif présidé par Marc Rapilly s’attache à « tisser des liens » à travers ses productions cinématographiques. Après un moyen métrage et un court métrage, le premier long métrage d’Art Vif, Liberté si je veuxsorti en 2018, il a été primé au festival du film social.
Notre objectif est de réunir des personnes qui ne se connaîtraient pas autrement, de permettre la pratique de l’art à des personnes qui ne l’imagineraient pas.
Dans Yolo, nous n’avons qu’une vie, le rôle principal de Tom est joué par Martin Legros, un acteur professionnel. Mais il est entouré d’amateurs, principalement des habitants de La Guérinière, comme les « deux Mohamed », Mis et Laradji, qui jouent ses deux amis. « C’était extrêmement intéressant de jouer avec des non-professionnels », insiste l’acteur qui habite le quartier voisin de la Grâce-de-Dieu. « Cela apporte de l’authenticité au film. Et puis, quand on joue, on s’en fiche : on était une bande de copains, on a tous bien rigolé. »
Membre du collectif et éducateur de rue au sein du Service d’Action Préventive, Jérôme Turge a travaillé dur pour créer du lien entre l’équipe du film et les habitants du quartier. « On ne connaît pas tout le monde, mais tout le monde nous connaît, ceux qui ont aussi un rôle en plus sourient. Cela a facilité les choses. « Nous avons été très bien accueillis, confirme Marc Rapilly.
A sa sortie de prison, où il était incarcéré pour trafic de drogue, Tom veut reprendre le contrôle de sa vie pour ne pas retourner derrière les barreaux. Entre le banc du square où il passe le plus clair de son temps à bavarder avec des amis, et la salle de boxe où il évacue sa colère, il se débat avec la formation sans espoir de Pôle emploi. Un stage chez un primeur suivi par l’administration pénitentiaire – et le sourire d’un employé de la collecte – lui ont donné l’idée de créer un potager sur la pelouse au pied de son immeuble.
Deux semaines en vitrine au Pathé-Rives de l’Orne
Le film Yolo, on n’a qu’une vie est soutenu par le cinéma Pathé des Rives de l’Orne. Après l’avant-première organisée le mardi 15 novembre, qui a fait salle comble, quatre séances sont programmées cette semaine. Hier mercredi (13h05), demain vendredi 17 (14h55), samedi 18 (13h05) puis lundi 21 (20h35). Le film de Laurent Bradd sera à nouveau projeté la semaine suivante, du 23 au 29 novembre. « C’est une vraie fierté », ne cache pas Mohamed Mis, impatient de découvrir l’affiche du film sur le tout nouvel écran géant du Pathé, sur l’esplanade des Rives de l’Orne.
« Une autre photo du quartier »
Au fil des saisons et de la croissance des légumes, le jardin devient le rendez-vous des habitants de la rue Gandhi, toutes générations confondues. Tout en cultivant son jardin, Tom prend sous son aile sa jeune voisine Naïma, rencontre Michel, un ami de son père qui connaît le cycle de la nature et sait manier la bêche… » En nous voyant déambuler à l’arrière de leur maison, de nombreux habitants ils sont intéressés par le projet et sont devenus des figurants », sourient Laurent Brard et Myriam Lotton, également assistante à la réalisation. « Tout le monde a respecté le silence quand c’était nécessaire et a fait en sorte que tout se passe dans les meilleures conditions. Les résidents ont apprécié que leur quartier soit mis en valeur. »

C’est aussi ce qui a convaincu les deux Mohamed de se lancer dans l’aventure. Respectivement livreur et spécialiste du pneu, ils ne s’étaient jamais rencontrés devant une caméra.
C’est une bonne expérience, à renouveler. De plus, le film offre une autre image du quartier. Nous n’avons pas à nous mentir, cela a été un peu négligé ces dernières années. Alors que beaucoup de belles choses se passent pour les jeunes.
Mais le film n’élude pas le côté obscur des lotissements, ce trafic d’herbe sous les arcades et la pression des trafiquants de drogue, ni la difficulté d’échapper au déterminisme social. Yolo, nous n’avons qu’une vie montre La Guérinière sous le soleil et sous la pluie, tout ce qu’il faut pour faire pousser des tomates.
* Yolo est l’acronyme de l’expression anglaise « you only live once ».
Cet article vous a-t-il été utile ? Sachez que vous pouvez suivre Liberté Caen dans l’espace Mon Actu. En un clic, après votre inscription, vous retrouverez toute l’actualité de vos villes et marques préférées.